Elargissement des missions des pharmaciens : les IDEL infirmières libérales inquiètes

Elargissement des missions des pharmaciens : les IDEL infirmières libérales inquiètes

Face à l'élargissement des missions des pharmaciens, les IDEL infirmières libérales s'inquiètent d'un grignotage progressif de leurs compétences.

Elargissement des missions des pharmaciens : les IDEL infirmières libérales inquiètes

Antoinette Tranchida est une infirmière libérale en colère. Elle qui est aussi vice-présidente de l’ONSIL (Organisation Nationale des Syndicats d’Infirmiers Libéraux) dénonce la décision du Conseil d’État en décembre dernier de donner raison au Conseil de l’Ordre Pharmacien. Ce dernier avait intenté un recours pour permettre aux pharmaciens de pouvoir « proposer des conseils et prestations destinés à favoriser l’amélioration et le maintien de l’état de santé des personnes ». Alors que le premier ministre était censé prendre un décret relatif aux nouvelles missions des pharmaciens avant le 15 juillet, elle se réjouit que les « syndicats aient quitté la table de négociations ». De son côté, la FNI montre la même méfiance : dans son communiqué de presse du 5 juillet, elle fait mention d’un « projet sur la table depuis dix ans [qui] n’avait pas avancé tant il posait de difficultés à l’ensemble des acteurs et notamment aux infirmières libérales ».

Valoriser une expertise

« Quand vous êtes infirmière libérale, vous entrez dans l’intimité des gens. Nous voyons comment nos patients se nourrissent, nous pouvons constater s’ils font de l’exercice ou non. Nous avons une vision globale des patients qu’aucune profession médicale ou paramédicale ne peut avoir. Les patients finissent par nous appeler par notre prénom, sans même connaître notre nom. Le pharmacien, on ne l’appelle pas », tranche Antoinette Tranchida.

En effet, les infirmières libérales sont en première ligne pour « repérer les besoins fondamentaux, les corriger, les rectifier. Quand un patient a des problèmes de marche, on le stimule, on restitue ses capacités motrices, on lui redonne un peu d’autonomie », explique-t-elle. Les IDEL sont à même de pratiquer l’éducation et la prévention. « Pourquoi ne pas améliorer l’existant, c’est-à-dire nous ? » demande-t-elle, face à cette décision en faveur des pharmaciens qu’elle ne comprend pas.

Des pharmaciens qui remplaceraient les IDEL ?

« Des soins ambulatoires en plus de la vaccination, de la prévention avec le dépistage du mélanome, de la télémédecine, des conseils etc. et pourquoi pas la distribution de journaux en deal avec la Poste ? », les pharmaciens pourraient tout faire, ironise la FNI.

Avec ces nouvelles missions potentielles, les pharmaciens « veulent surveiller la chimiothérapie », s’offusque de son côté Antoinette Tranchida. « Mais préparer un pilulier, c’est facile », tempère-t-elle. Sauf qu’assurer un suivi au quotidien, c’est autre chose. « Quand je vais à domicile, je vérifie que les gens n’ont pas oublié leurs médicaments. Comment les pharmaciens pourront-ils faire cela ? » Par ailleurs, l’expérience de la vaccination a été un échec, en ne permettant pas, selon elle, « d’augmenter la couverture vaccinale ».

 A ses yeux, la profession d’infirmière libérale est cernée de toutes parts, vidée progressivement de sa substance. D’un côté les pratiques avancées – « nous ne les avons pas attendues pour faire de l’éducation thérapeutique » -, les auxiliaires de vie embauchées à l’hôpital pour faire des soins, la HAD pour prendre en charge les suites de l’ambulatoire, car « désormais, l’hôpital doit aller à l’extérieur pour ne pas perdre d’argent ».

 La FNI assène également « que les IDEL refusent d’assister bras croisés au démantèlement de leurs compétences ». « Les grands oubliés sont les patients. Face à un alité ou un malade chronique, je ne vois pas comment les pharmaciens pourront se déplacer à domicile. Qu’ils restent dans leur officine et fassent bien leur travail », estime Antoinette Tranchida. 

Delphine Bauer

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