Utilisation de messageries instantanées par les soignants : quelle réglementation ?

Vincent Lautard
30 novembre 2020 @ 9 h 38 min

De plus en plus de soignants et de personnels d’encadrement des établissements sanitaires ou médico-sociaux utilisent, dans leur pratique professionnelle, des messageries instantanées (Messenger, WhatsApp, Telegram…) pour échanger sur des patients.

Cet article a été rédigé par un juriste en droit de la santé et de la protection sociale, pour Actusoins.com. 

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Cette pratique s’est accélérée pendant l’épidémie de COVID19 et les deux confinements. Pourtant, les professionnels de santé n’ont pas le droit d’utiliser ce type de messageries pour dialoguer sur l’état de santé d’un malade et sur les soins et traitements qu’ils lui prodiguent. Explications. 

Utilisation de messageries instantanées par les soignants : quelle réglementation ?Comme le dispose le code de de la santé publique, chaque établissement de santé privé ou public doit constituer un dossier médical (dossier papier ou informatisé) pour chaque patient hospitalisé.

Chaque pièce du dossier comporte l’identité du patient (nom, prénom et date de naissance), la date, et l’identité du professionnel qui écrit dans le dossier. On doit retrouver dans ce dossier, l’ensemble des informations sur la prise en charge du patient (les transmissions et observations rédigées par les soignants, les prescriptions et les documents de validation des soins…).

L’accès au dossier informatisé est conditionné à un login et mot de passe sécurisé pour chaque soignant : le professionnel de santé qui écrit sur le dossier peut ainsi être clairement identifié.

Comme le dispose l’Article R1112-7 le code de la santé publique : « Les informations concernant la santé des patients sont soit conservées au sein des établissements de santé qui les ont constituées, soit déposées par ces établissements auprès d’un hébergeur. Le directeur de l’établissement veille à ce que toutes dispositions soient prises pour assurer la garde et la confidentialité des informations ainsi conservées ou hébergées. »

L’hébergeur doit être agréé. Le professionnel de santé libéral doit également constituer un dossier pour chaque patient et son stockage doit également être sécurisé.

>> LIRE AUSSI – Sécurisation des données personnelles des patients : quelles obligations ? >>

Confidentialité

L’utilisation d’une messagerie privée comme Messenger ou WhatsApp avec un outil privé (smartphone par exemple) pour échanger sur un patient ou plusieurs patients et pour partager des informations sur ces derniers va donc à l’encontre des règles propres au dossier patient, à l’échange d’information sur un malade ainsi qu’au stockage de données concernant ce dernier.

Au final, le soignant utilise ces messageries comme une sorte de « dossier patient » parallèle, ce qui est strictement illégal et peut entrainer de nombreuses dérives (défaut de continuité des soins, défaut de secret professionnel…).

Et n’oublions pas, que l’échange et le partage d’information au sein d’une même équipe ou en dehors de celle-ci (si cela est autorisé légalement), doit toujours utiliser des méthodes de communication qui préservent la confidentialité des informations médicales et de la vie privée du patient.

En cas de défaut de prise en charge d’un patient ou de fuite d’information concernant ce dernier, lié à l’utilisation d’une messagerie privée, la responsabilité disciplinaire, civile et/ou pénale du professionnel de santé pourra être engagée.

Vincent Lautard

Infirmier et juriste en droit de la santé

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2 réactions

nanas
4 décembre 2020

Dans le secteur libéral, nous utilisons beaucoup le téléphone portable. Les informations sont données et reçues via ce moyen et ce, depuis toujours.

Emy
4 décembre 2020

Une question: cette interdiction est-elle également valable quand le patient dont il est question, n’est pas identifiable (c’est-à-dire si son nom n’apparaît pas)?

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