IPA médecine d’urgence : où en est le dossier ?

En théorie, les premiers IPA Infirmier en Pratique Avancée médecine d’urgence devraient être formés dès septembre 2021. Les négociations avancent, même si certains contours restent à déterminer.

IPA infirmier de pratique avancée médecine d’urgence : où en est le dossier ?Julie Devictor, la présidente du CNP IPA (Conseil national professionnel des infirmiers en pratique avancée) se veut rassurante : les travaux, incluant la DGOS, le ministère de l’enseignement supérieur, le CNP IPA, le CNP infirmier, CNP de Médecine d’Urgence mais aussi les services de santé des armées, ont bien repris en octobre.

Si les discussions avancent, elle reconnaît cependant une déception. « La DGOS a pensé le champ d’intervention de l’IPA urgence en le calquant sur la spécialité de la médecine d’urgence qui comporte trois domaines: le SAU, le SMUR et le SAMU. Or le CNP IPA souhaitait élargir le champ d’action aux soins primaires dans le cadre de soins  », rappelle-t-elle, se basant sur le fait que de très nombreux patients passant par les urgences bénéficient de soins non programmés « qui ne nécessitent pas nécessairement de se rendre aux urgences».

Mais la DGOS a fait savoir que l’élargissement du champ d’action n’était pas envisageable. Dommage, regrette Julie Devictor, car « la plus-value de la filière IPA médecine urgence vient précisément de son décloisonnement et sa transversalité ».

Au sein de ces négociations, Julie Devictor a dû « rassurer » certains médecins urgentistes en leur rappelant que les « IPA médecine d’urgence n’ont pas vocation à remplacer les médecins urgentistes ».

Elle a aussi dû discuter avec les IADE – qui n’ont cependant pas été invités par la DGOS au groupe de travail. « Nous leur disons : ‘’ ce n’est parce que nous avons des actes communs, que les missions sont les mêmes’’, sans oublier que les IPA médecine d’urgence s’appuient aussi sur des actes qui auparavant étaient réservés au champ médical. Tout évolue ».

Mission complémentaire

Julie Devictor résume : « On nous dit que les IPA médecine urgence vont remplacer les médecins, les IADE, les cadres, mais si les IPA sont mises en place, c’est pour agir complémentarité, pour répondre à des besoins de santé peu ou mal pourvus. »

Au final, rappelle aussi la présidente du CNP IPA, « les soins critiques sont une activité minoritaire aux urgences. Il y a de la place pour les IADE et pour les IPA. Les IPA seront transversaux et on peut imaginer qu’ils travailleront au SAU quand il n'y a pas de sortie du SMUR qui nécessite la présence d’un IPA». Au final, les IPA interviendront bien dans les trois domaines de la MU (cités ci-dessus) « avec davantage d’autonomie, notamment dans le cadre de certains parcours identifiés », assure-t-elle.

Si les négociations avancent à la DGOS, certains professionnels réfléchissent encore aux contours que pourrait prendre cette nouvelle filière sur le terrain. C’est le cas d’Orianne Plumet, infirmière, vice-présidente du collectif inter-urgences, qui a fait partie l’année dernière d’une commission d’experts composée de soignants des urgences au sein de l’ARS d’Ile-de-France.

En novembre dernier, cette commission a rendu un avis qui se veut objectif sur la création d’une filière IPA médecine d’urgence. Au cours de leurs réflexion, plusieurs questions ont émergé : quand on parle d’urgence, parle-t-on de pathologies d’urgence vitales ou de structures de soins ?

Ensuite, les IPA MU permettront-ils de dégager du temps médical et de le combler par les paramédicaux, ou de répondre à des besoins de santé pas traités faute de compétences ?, se sont interrogés ainsi Orianne Plumet et ses collègues.

Dans les services d’urgences qu’elle a consultés, ressortait un double sentiment : « à la fois un attrait, mais aussi une forme de confusion entre les IPA et les protocoles de coopération déjà existants ».

Repenser le parcours de soins

Elle soulève ensuite la pertinence de repenser le parcours de soin : à quel moment les IPA interviendront-ils par rapport à l’IAO et au médecin ? Si elle se prend à imaginer une consultation IPA immédiate, cela nécessiterait «un même nombre d’IPA dans toutes les structures ». Et donc de créer des postes… Difficile au moment où les budgets du public sont de plus en plus serrés.

Mais en dehors du parcours de soin, « on peut aussi imaginer les IPA s’emparer de sujets comme les analyses de charge de travail, l’évaluation des besoins de formation ou la contribution recherche », sans que cela n’empiète sur le cadres de proximité, suggère encore Orianne Plumet. En médecine de ville, les IPA pourraient aussi être utiles pour « les transferts inter-extra hospitaliers », par exemple.

Si des questions doivent encore être tranchées, le calendrier, lui, avance. Du côté des négociations, chaque partie invitée à discuter a rendu ses contributions. Une réunion de synthèse s’est tenue le 28 janvier dernier. « Le premier groupe de travail sur le référentiel d’activité a désormais laissé place à un groupe de travail portant sur le référentiel de formation», précise Julie Devictor à ce titre.

Cette prochaine étape, espère-t-elle, sera plus simple, «  car nous ne partons pas de zéro. Nous pouvons nous appuyer sur l’existant et l’adapter selon les activités nouvelles de cette mention ». Après se dérouleront les étapes de validation ultimes (Conseil National de l’Enseignement Supérieur Et de la Recherche, Académie de médecine…). Mais « nous serons prêts pour septembre », assure-t-elle.

Delphine Bauer

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Réactions

2 réponses pour “IPA médecine d’urgence : où en est le dossier ?”

  1. Sophie Calmard dit :

    À quoi servent les IPA médecine d’urgence alors que ça fait partie, y compris dans les textes de loi, des fonctions dévolues aux IADEs dont la formation (24 mois de spécialisation) comprend l’anesthésie, la réanimation et les soins d’urgence, dont le pré hospitalier)?
    Le SAMU, mis en place par les anesthésiste- reanimateur, dont ils ont été progressivement exclus par des urgentistes dont le cursus est loin de valoir celui des MAR, voit maintenant les IADEs éjectées à leur tour.
    Ne pas les inviter au groupe de travail est tout à fait révélateur de la volonté d’éliminer une catégorie de professionnels de santé dont le cursus et la fiabilité nous est envié à l’étranger.
    « Elle a aussi dû discuter avec les IADE – qui n’ont cependant pas été invités par la DGOS au groupe de travail. « Nous leur disons : ‘’ ce n’est parce que nous avons des actes communs, que les missions sont les mêmes’’  »
    Si nos missions ne sont pas les mêmes, pourquoi commencer par nous retirer celles qui sont inscrites dans la loi comme devant être préférentiellement les nôtres, comme le SMUR?
    Pensez-vous vraiment que la qualité des soins va en être renforcée?

  2. Huet Bruno dit :

    Pourquoi avoir un professionnel qui doit être par définition autonome en SMUR avec un médecin qui a besoin d’un collaborateur pour les prises en charge pré hospitalière ???
    Pourquoi vouloir pouvoir réaliser des gestes techniques sur la prise en charge des urgences vitales alors que ces mêmes gestes sont réalisés très rarement par les médecins urgentistes et qui posent la question de leur maîtrise dans un temps si restreint de formation.
    L’urgence vitale aux urgences sera prise en charge par le médecin qui a besoin d’un collaborateur pour l’aider par d’un professionnel autonome.
    Alors que le CSP indique qu’on doit privilégier les IADE pour ce type d’activité ?
    Que dans la formation IADE certains UE sont exclusivement consacrés à cet item.
    Concernant l’activité pré hospitalière cela ne correspond pas à un besoin de santé et ne permet pas d’économiser le temps médical si précieux.
    La paramedicalisation des interventions extra hospitalière a fait ces preuves depuis de très nombreuses années par les interventions sur protocole donc effectivement ce domaine n’apporte rien en terme de besoin et d’économies de moyens médicaux.
    L’IPA n’a pas besoin d’empiéter sur les fonctions et rôle des autres professionnels pour exister comme celui des cadres par exemple.
    Par contre prendre en charge des patients aux urgences en toute autonomie pour des motifs de consultation ciblée est parfaitement adaptée à la pratique avancée de la médecine d’urgence.
    Pouvoir signer des ordonnances et des arrêts de travail correspondant aux prise en charge doit être un objectif et non pas de réaliser une liste de acte qui ne seront pratiquement jamais réalisés en revendiquant une activité qui correspond à d’autres professionnels

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