Vélos et trottinettes séduisent les infirmiers libéraux

Chercher une place pour se garer, monter et descendre de la voiture, perdre du temps dans les embouteillages… : ces multiples raisons poussent de plus en plus d’infirmiers libéraux à choisir des modes de déplacement doux comme le vélo ou la trottinette électrique. Cet article a été publié dans le numéro 41 d’ActuSoins Magazine (juin, juillet, août 2021). 

Marie-Christine, infirmière libérale à Tignieu-Jameyzieu, village près de Lyon, effectue depuis trois ans ses tournées en vélo électrique. © Marie Allenou

Le casque pendu au guidon, Marie-Christine ouvre d’une main le portail et manœuvre son vélo de l’autre. Le geste est bien rôdé, elle l’a répété des centaines de fois. Infirmière libérale (idel) à Tignieu-Jameyzieu, village près de Lyon, elle effectue depuis trois ans ses tournées à vélo électrique.

L’infirmière décroche sa sacoche, pose son vélo et pénètre chez Annie, sa patiente. « Pour aller à la résidence d’un de mes patients en voiture, il me fallait 25 minutes pour traverser la ville au lieu de dix en vélo, à cause des bouchons », explique Marie-Christine.

Face à ce constat, elle a acheté un vélo électrique. Bilan : un sentiment de liberté, des économies d’essence, plus de proximité avec les patients et du stress en moins. L’infirmière ne voit que des avantages à son nouveau mode de déplacement.

On pourrait croire que prendre le vélo ou la trottinette est une question d’engagement écologique. Pour ces infirmiers et infirmières libérales, c’est surtout un moyen de gagner du temps. Mettre de côté la voiture permet notamment éviter les embouteillages.

Gain de temps et praticité

Sébastien Gallois, infirmier libéral à Rivesaltes près de Perpignan, a opté pour la trottinette électrique. Pliable, passe-partout, elle lui permet d’éviter les inconvénients du stationnement. « Je n’ai pas à chercher une place pour me garer. Je gagne du temps par rapport à la voiture. La trottinette est aussi plus intéressante que le vélo car je peux la rentrer chez les patients », souligne-t-il.

Se déplacer en voiture est pénible, ajoute-t-il : « On monte et descend parfois 50 fois par jour de la voiture. Et ça m’est aussi arrivé deux ou trois fois d’avoir un PV de stationnement ».

Un sentiment partagé par Marie Zehaf, infirmière libérale remplaçante à Besançon. Elle apprécie d’arriver directement chez ses patients à vélo. « Il y a plein d’attaches dans la ville. Je peux aussi entrer dans les porches. Cela me permet d’arriver au pied du patient alors qu’avec une voiture on doit souvent stationner plus loin », détaille l’infirmière. Elle effectue ses tournées à vélo depuis cinq ans. Un mode de déplacement qu’elle n’échangerait plus pour la voiture.

Une nouvelle organisation

Sébastien Gallois, infirmier libéral à Rivesaltes près de Perpignan, a opté pour la trottinette électrique, pliable et passe-partout. © DR

Passer de la voiture à un mode de déplacement doux nécessite toujours un peu d’investissement. Souvent, les idels optent pour un modèle électrique qui permet d’aller plus vite et d’économiser son énergie, ce qui a un coût, comme les mallettes et d’autres équipements nécessaires.  

« Mon vélo m’a coûté 2000 euros. J’applique les mêmes frais qu’en voiture, en termes d’indemnités kilométriques », explique Marie-Christine. Elle a choisi de ne pas faire passer l’achat de son vélo en frais professionnels, car elle s’en sert aussi pour le loisir.

Côté matériel, elle a gardé la même sacoche qu’elle utilise en voiture et l’accroche sur le porte-bagage. Une petite mallette installée sur le devant de son vélo et une assurance à deux euros par mois contre le vol sont ses seuls investissements supplémentaires.

Marie Zehaf a aussi acheté personnellement son vélo – 2500 euros – car elle l’utilise en dehors du travail. Elle a opté pour des rangements plus grands que ceux choisis par Marie-Christine. « J’ai deux sacoches de vélo de 40 sur 30 cm, une pour mon matériel et une pour les prises de sang. Maintenant les gens ont tout le matériel chez eux, notamment pour faire les pansements, je n’ai donc pas besoin de beaucoup de choses », détaille-t-elle.   

Changer de mode de déplacement nécessite aussi quelques essais et ajustements pour s’adapter au matériel et à la tournée. Sébastien, qui parcourt jusqu’à 45 kilomètres par jour, a d’abord tâtonné. « J’ai commencé la trottinette en janvier 2020, avec une trottinette légère. Je ne pouvais pas faire toute la tournée parce que la batterie ne tenait pas. J’ai été en arrêt de mi-2020 à mars 2021 et j’ai repris avec une nouvelle trottinette qui tient toute la journée ».

Cette nouvelle trottinette lui a coûté 500 euros, que l’infirmier a fait passer en frais professionnels. Il a également essayé deux sacs à dos différents pour transporter son matériel. Aujourd’hui un gros sac à dos conçu pour les photographes complète son attirail. 

Se détendre pour mieux soigner

Les infirmiers que nous avons rencontrés sont unanimes. Le vélo et la trottinette leur permettent de décompresser et de relâcher la pression tout au long de la journée. Une dimension que Marie Zehaf apprécie particulièrement.  « Cela me fait faire du sport, me fait bouger. On est beaucoup plus détendu que quand on est dans les embouteillages. Il y a un vrai sentiment de liberté. C’est comme un sas de décompression », témoigne l’infirmière bisontine. « Cela fait une coupure entre les patients et, en plus, lorsque l’été approche, c’est vraiment agréable », résume Sébastien.

Ce que Marie-Christine préfère, c’est le changement que le vélo apporte dans le rapport aux patients. Elle se sent plus détendue et cela lui permet d’amener un nouveau sujet de conversation. « Cela les fait sourire et change leur quotidien. Ils me demandent pourquoi j’ai pris le vélo ou pourquoi je ne l’ai pas pris », raconte-t-elle.

« J’aime qu’elle vienne en vélo, cela me plaît. Elle entretient notre santé par les soins et la sienne en prenant le vélo pour moins polluer », s’amuse Annie, une patiente de Marie-Christine. Myriam, parente d’un patient, trouve que le vélo apporte du positif dans la relation entre l’infirmière et ceux qu’elle soigne. « Les soins sont plus détendus parce qu’elle est plus pimpante et de bonne humeur », décrit Myriam. Et l’infirmière est une bonne ambassadrice du vélo puisque les deux femmes ont expliqué vouloir se mettre au vélo électrique.

Impossible d’abandonner le véhicule

Même si les mobilités douces ont largement leur préférence, il n’est pas facile pour autant de se passer de la voiture. Le mauvais temps et les longues distances obligent parfois les infirmiers à se mettre à nouveau au volant.

« Je fais mes prises de sang en voiture, je vais au labo, puis je prends le vélo à partir de 8 h 30 », explique Marie-Christine. L’infirmière explique que les prélèvements prennent trop de place pour être transportés sur son vélo. Ensuite, « sur des petites tournées, où je fais des sauts de puces autour du cabinet, le vélo ce n’est pas gênant. Elle abandonne aussi le vélo pendant quelques mois de l’année, l’hiver, pour se protéger du froid et, lorsque « les journées sont chargées, je ne le prends que pour ma tournée du soir », ajoute-t-elle.

Sébastien et Marie craignent aussi le mauvais temps. « C’est un peu plus dérangeant quand il fait froid, car je commence à cinq heures le matin. Et quand il pleut, je prends la voiture. », développe l’infirmier qui privilégie cependant sa trottinette. Marie Zehaf évite aussi au maximum de prendre la voiture : elle met parfois une cape quand il pleut, mais elle a dû se rendre à l’évidence : arriver trempée chez les patients, ce n’est pas l’idéal.

Elle effectue également des remplacements à Miserey, à quelques kilomètres de Besançon, ce qui l’oblige aussi à prendre la voiture. « Quand je dois prendre ma voiture je suis contrariée. Je dois ensuite faire du vélo le soir pour me détendre », témoigne-t-elle. Devenus indispensables, vélos et trottinettes ne sont pas prêts de prendre la poussière.

Cet article est paru dans le n°41 d’ActuSoins Magazine (juin, juillet, aout 2021)


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