Lozère : un projet pilote de télé-expertise en psychiatrie

Myriem Lahidely
3 juin 2024 @ 15 h 15 min

À Mende (48), le centre hospitalier François-Tosquelles expérimente la télé-expertise en santé mentale avec des médecins généralistes d’une CPTS. Objectif : structurer la pratique en réduisant la distance entre libéraux et psychiatres, dans un département à la démographie médicale sensiblement restreinte.

Lozère : un projet pilote de télé-expertise en psychiatrie

© ShutterStock

Développer des alternatives pour sécuriser la prise en charge des patients et améliorer le lien ville-hôpital est l’objectif du projet pilote en cours, en psychiatrie, avec le Centre hospitalier de Mende.

En Lozère, cette spécialité, en particulier, est très cloisonnée et difficile d’accès. « Vu notre faible densité médicale, nous sommes amenés à prendre en charge nos patients bien plus loin, et de façon plus avancée », note Elodie Repole, médecin généraliste à Saint-Étienne-du-Valdonnez. « Réduire les délais d’accès permet d’éviter des dégradations de l’état de santé et de lutter aussi contre le renoncement au soin. »

Plutôt prévenir

Le dispositif pilote proposé par le CH François-Tosquelles, permet à des généralistes de solliciter un avis directement auprès d’un psychiatre. « Cela permet de faire patienter le malade, avec des éléments de spécialiste. » La télé-expertise se fait via la plateforme SPICO (Système de partage d’information et de coordination en Occitanie), un « whatsapp médical sécurisé », indique Raphaël Nassif, médecin psychiatre référent de l’unité de télémédecine du CH (Etablissement public de santé mentale de Lozère). « En intervenant tôt, on est plus dans la prévention que dans le curatif. »

« On peut démarrer un accompagnement mais nous avons besoin du regard plus précis du spécialiste » ajoute le docteur Repole, référente Lozère de la mission accès au soin qui porte le projet de télé-expertise en psychiatrie pour la CPTS Terre des Sources Lozère Est. Cette structure a signé une convention dans ce sens, avec le centre hospitalier François-Tosquelles. « Ce dispositif de télé-expertise qui s’adresse au départ, aux généralistes de cette communauté professionnelle, nos requérants, couvre tout le territoire... », détaille Raphaël Nassif médecin psychiatre et praticien hospitalier au CH de Mende.

Avec 75 000 habitants, la Lozère est le département le moins peuplé de France, mais la proportion de prise en charge psychiatrique n’est pas négligeable. « Beaucoup de personnes âgées et d’agriculteurs ne peuvent pas se déplacer », ajoute le psychiatre. Dépressions, troubles anxieux, troubles bipolaires, dépendances, addictions aux opiacés…  « En libéral, c’est l’essentiel de nos patients », fait remarquer Elodie Repole.

Contribution des infirmiers

Le dispositif de télé-expertise testé intègre aussi des partenaires tels que la gériatrie et des équipes soignantes. « Nous ne pouvons pas travailler en télémédecine sans la contribution de la pratique infirmière », affirme Raphaël Nassif. « Les IDE vont chez les patients, sont sur le terrain, reçoivent des appels de patients, de familles. » Le département compte par ailleurs cinq Centres médico-psychologiques (CMP). « En cas d’absence du médecin, il nous arrive souvent de faire une consultation en urgence avec une IDE avant de décider d’une hospitalisation, d’un soin ou d’un traitement à adapter. » Idem avec les IDEL.

Lauréat d’un projet de télémédecine dès 2021, dans le cadre du FIOP (Fonds d’innovation organisationnelle en psychiatrie) – et fort d’une expérience réussie dans les EHPAD du territoire – le CH de Mende avait centralisé les demandes et dédié une IDE coordinatrice, à 80 %, à cette pratique médicale à distance. Dans le projet pilote en cours, la mission principale de la soignante est de sensibiliser les médecins libéraux, les établissements médico-sociaux ou les centres hospitaliers locaux de tout le territoire à la télé-expertise. D’évaluer, orienter.

Le projet pilote fait tache d’huile

« Si un praticien libéral appelle, je peux lui suggérer la télé-expertise entre autre solution », précise Stellia Brunel, l’IDE coordinatrice. Recours les plus fréquents : « une équipe ou un médecin d’EHPAD confronté à un problème sur le traitement d’un patient qu’il faut reconsidérer. » Le dispositif pilote fait tache d’huile : l’EPSM lozérien est, à ce titre, déjà très sollicité par d’autres centres hospitaliers de la région Occitanie.

« Des équipes veulent mettre en place leur propre service de télé-expertise », indique la coordinatrice selon qui anticiper la survenue de la crise ou de l’urgence, permet d’éviter beaucoup d’hospitalisations. « En Cévennes par exemple, la médecine à distance a permis à certains patients un meilleur accès au soin, à d’autres, un accès tout court », se réjouit l’IDE. « Même si rien ne remplace le présentiel. »

Myriem Lahidely

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