« Nous devons parler du prélèvement forcé d’organes pour mettre un terme à la persécution »

L’association Les infirmières contre les prélèvements forcés d’organes vise à informer la communauté soignante, défendre la déontologie et promouvoir l’éthique contre cette pratique exercée en Chine. Le point avec Géraldine Monti, infirmière, responsable de la filière européenne.

Chaque mois, ActuSoins présente une organisation infirmière (voir encadré). 

Géraldine Monti, infirmière, responsable de la filière européenne de l'association NAFOH

Géraldine Monti, infirmière, responsable de la filière européenne de l'association NAFOH. ©DR.

Comment est née cette association ?

Nurse against forced organ harvesting (NAFOH) est une branche de DAFOH (pour doctors), une association créée en 2006 à Washington par des médecins exerçant à travers le monde.

À cette période, les premières allégations de prélèvements forcés d’organes en Chine ont commencé à être rendues publiques. Ces médecins se sont rassemblés après avoir réalisé la gravité de ces crimes pour la médecine, l’éthique et l’humanité. 

66 % des patients qui se rendent à l’étranger pour une greffe vont en Chine. Il est reconnu internationalement qu’ils payent pour des organes obtenus à la suite de l’exécution d’une personne.

Face à cette réalité, avec des consœurs infirmières, nous avons décidé de créer la branche européenne de NAFOH, afin d’informer la profession et agir.  

Quelle est la différence entre les prélèvements forcés d’organes et le trafic d’organes ?  

Le prélèvement forcé d’organes consiste à prélever des organes vitaux chez des personnes tuées explicitement dans cet objectif.

La Chine a commencé en 1980 chez les prisonniers condamnés à mort. Car à l’époque, il n’existait pas de politique de don d’organes, car d’après leurs croyances, les Chinois doivent se faire enterrer avec l’ensemble de leurs organes. De fait, face aux besoins, le milieu médical a commencé à prendre des organes chez des condamnés à mort. Par ailleurs, en 1999, la Chine a commencé à persécuter le groupe de pratiquants de Falun Gong, devenus de plus en plus nombreux (environ 80 millions).

Dans un pays totalitaire, les personnes libres de penser ne plaisent pas. L’État a voulu les exterminer. Ils ont été emprisonnés, torturés, beaucoup sont morts mais sans renoncer à leur croyance. En novembre 1999, un cap a été passé avec le prélèvement forcé d’organes. Lorsque les pratiquants du Falun Gong sont arrêtés, ils font l’objet d’un check up avec un bilan sanguin et dès lors que les hôpitaux ont besoin d’un organe qui correspond, ils sont tués à la demande. Généralement, ce sont des chirurgiens chinois qui procèdent à l’exécution afin de préserver les organes. Nous nous sommes d’ailleurs questionnés sur l’implication éventuelle des infirmières chinoises dans les prélèvements forcés d’organes. En 2017, la pratique s’est poursuivie avec les Ouïghours.

Le trafic d’organes consiste, quant à lui, en un commerce illégal d’un élément du corps, mais le donneur peut être consentant ou non, tout comme il peut rester vivant. L’argent rapporte à une mafia internationale.

En Chine, les demandes d’organes ne sont-elles pas payantes ?

Elles le sont, et il s’agit d’une source indéniable d’argent pour les hôpitaux. D’ailleurs, habituellement, les courbes concernant les prélèvements d’organes sont les mêmes dans tous les pays. Or, entre 2000 et 2004, la Chine a affiché une hausse de 250 %. 

Les temps d’attente sont très courts pour obtenir un organe : entre 15 jours et 1 mois. Il est possible de le réserver en ligne, sur les sites des hôpitaux. Et en cas de rejet d’une greffe, il est possible d’obtenir un autre organe sous 24 heures.

La Chine a, par ailleurs, considérablement développé ses infrastructures. Entre 1999 et 2006, le nombre de centres de transplantation a augmenté de 400 % passant de 150 à 600 établissements.

Face à cette réalité, le gouvernement veut réduire cette pratique au silence. De notre côté, nous souhaitons en parler, donner des outils pour que le message circule et ainsi faire entendre la gravité de la situation. En maintenant le silence, la situation perdure. Le briser permet d’agir pour mettre un terme à cette persécution. Car pour toute personne qui se rend en Chine pour acheter un organe, une personne innocente est tuée. En France aussi des personnes disparaissent des listes d’attentes des demandeurs d’organes…

Pour autant, nous pensons que tout le monde est victime de la situation. Même les infirmiers et les chirurgiens qui participent aux exécutions des prisonniers car finalement, c’est l’État qui utilise la médecine pour commettre ces actes.

Quel rôle peuvent jouer les infirmiers dans ce domaine ?

Notre profession représente 50 % des soignants dans le monde. Nous sommes les premiers à être en contact avec les patients, dont certains peuvent être en attente de greffe. Nous jouons un rôle de prévention, de sensibilisation et d’éducation vis-à-vis d’eux ; un rôle d’autant plus important qu’aujourd’hui, le tourisme médical est en développement. La communauté doit être informée de ces pratiques.

Les infirmières peuvent retrouver de nombreuses informations sur notre site Internet et nous contacter si elles ont la moindre question.

Propos recueillis par Laure Martin

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Site internet : https://dafoh-france.org/nafoh-homepage

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