Les étrangers malades menacés d'expulsion

Amélie Cano
16 mai 2011 @ 8 h 41 min

Sénateurs et députés ont adopté mercredi 4 mai un amendement permettant l’expulsion d’étrangers souffrant de pathologies lourdes.

Les étrangers malades menacés d'expulsionDésormais, un étranger ne pourra rester en France que si son traitement est « absent » de son pays d’origine. Sénateurs et députés de la majorité (UMP, Union centriste, Nouveau centre) ont décidé de ne plus prendre en compte l’accès réel aux médicaments.

Un vote « incompréhensible » et « irresponsable » pour les associations de défense des malades et des immigrés. Car cet amendement, en plus d’être injuste, est injustifiable médicalement et financièrement.

Une loi dangereuse

Que ce soit pour le VIH, le diabète ou le cancer, les traitements existent en théorie partout dans le monde. Mais « présent » ne signifie pas « disponible » : « 60% des besoins urgents en antirétroviraux ne sont pas couverts en Afrique selon l’Onusida » s’alarme ainsi Antoine Henry, de l’association Aides.

« Cette loi va condamner à mort des milliers de malades » s’indigne-t-il. Car au-delà de la question du coût des médicaments, il y a aussi le problème de l’approvisionnement : comment estimer qu’un traitement est disponible quand il n’est distribué que dans la capitale et que les ruptures d’approvisionnement sont fréquentes ?

« Nous avons reçu récemment un Camerounais séropositif résistant aux traitements de première ligne. Mais les traitements de seconde et troisième lignes sont absents au Cameroun. Pourra-t-il rester en France ?» s’interroge ainsi Antoine Henry.

Une loi qui renforce l’arbitraire préfectoral

Seul espoir pour l’étranger malade, le préfet pourra l’autoriser à rester en France s’il estime qu’il y a des « circonstances humanitaires exceptionnelles », un concept nulle part défini.

C’est donc le préfet, et non le médecin, qui pourra décider en dernier lieu si l’état de santé du demandeur nécessite qu’il reste en France. Le médecin, lui, va être cantonné à « apprécier le niveau de risque ». « En fonction des données qu’on lui fournira sur le pays d’origine du patient, il devra apprécier les complications que pourront entraîner une interruption de traitement, ou un accès à des médicaments de moins bonne qualité » se désole le Dr Arnaud Veïsse, du Comité médical pour les exilés (Comede).« La seule question qui importe pour un médecin, c’est celle de la disponibilité et de la continuité des soins. Il va donc faire comme avant, mais avec un texte qui lui complique la vie ».

Un non-sens économique

L’objectif du gouvernement, avec cet amendement, était de lutter contre le « tourisme médical », cette pratique consistant à venir en France pour profiter de la Sécurité sociale. Une contre-vérité pour les associations : « moins de 10% des personnes possédant un titre de séjour pour raison médicale connaissait leur maladie avant d’arriver » assure le Dr Veïsse.

Selon le ministère de l’Intérieur, 28.460 personnes bénéficiaient de ce titre de séjour fin 2009, soit 0,8% de la population étrangère vivant sur le sol français. « Ces gens ont découvert leur pathologie en France. La majorité travaille et cotise à la Sécurité Sociale. En ne renouvelant pas leur carte de séjour, soit on les envoie mourir dans leur pays, soit on les pousse à la clandestinité » estime de son côté Antoine Henry.

« Ces malades n’oseront plus se faire soigner, ils attendront un stade avancé de leur maladie pour consulter. Cela coûtera plus cher à l’hôpital et à la Sécurité sociale. L’Inspection générale des Finances a déjà avertit que cette réforme aura un coût financier ».

Un appel du pied au Front National

La seule explication rationnelle à cet amendement est le bénéfice politique pour la majorité présidentielle. « Tous les parlementaires à qui nous avons parlé nous ont confirmé que cet amendement était une « commande » du gouvernement » confie le Dr Veïsse. L’amendement, d’abord présenté par le gouvernement puis les députés, a en effet été retoqué deux fois par les sénateurs avant d’être finalement adopté, dans une version plus dure encore.

À un an de l’élection présidentielle, les étrangers malades font donc les frais de la stratégie de séduction de l’extrême droite engagée par le gouvernement.

Pour aller plus loin :

– La version définitive du projet de loi relatif à l’Immigration, adopté le 4 mai en dernière lecture
– Le rapport 2009 du Comede sur la santé des exilés en France
– L’article de Rue 89 : Pourquoi le Sénat a capitulé sur l’expulsion d’étrangers malades

Amélie Cano

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13 réactions

Marie-Gabrielle Guillanton-Furaut
16 mai 2011

France , terre d’asile et des droits de l’HOMME !!!!!!!!!! – Mieux vaut ètre riche et en bonne santé , que pauvre et malade !!!

Sophie Mercier
16 mai 2011

Inadmissible …

Marie Pierre Ambert
16 mai 2011

c ‘est la honte,vive la France…..

Angele Bazemont
16 mai 2011

et les droits de l homme la dedans ils sont ou!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!

Christine Chazoulle Maleville
16 mai 2011

je suis plus mesuree que vous dans ma reaction car je travaille dans le milieu de la sante ….

Magali Betty
16 mai 2011

@Christine: ben justement tu devrais être scandalisée… Je suis idel et des info comme ça me révolte….!

Carpentier Tiphanie
16 mai 2011

Je travaille dans le milieu de la santé aussi et je trouve cela scandalleux!!!!!

Valérie Pascal
16 mai 2011

Vous n’avez pas lu complètement l’amendement!!!! ne survolez pas : lisez convenablement et analysez avant de crier au scandale!!!!!

Marie Christine Gallais
16 mai 2011

mais qui paye tout ça !

sansebastien13
16 mai 2011

Le contribuable Français bien sûr.

Marie Christine Gallais
16 mai 2011

c est vos et mes impots et je preferais qu ils servent à ameliorer notre systeme de sante ,car je crois que dans les annees qui vont venir nous n aurons plus le meme systeme de sante et la seule ceux qui ont de l argent pourront se soigner

Mandragore
17 mai 2011

C’est à vomir.

Tout comme certains commentaires.

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