Attendue depuis environ deux ans, la proposition de loi infirmière a été adoptée dans la nuit du 10 au 11 mars à l’Assemblée nationale. Le vote des députés, qui précède celui des sénateurs, est salué par les représentants de la profession même si quelques bémols sont pointés du doigt.
Adoptée à l’unanimité par les députés, la proposition de loi infirmière promet d’importantes avancées pour les 640 000 infirmiers. Portée par les députés Frédéric Valletoux et Nicole Dubré-Chirat, cette proposition de loi transpartisane introduit plusieurs notions clés pour la profession dans le but d’améliorer l’accès aux soins, en favorisant et renforçant la collaboration entre les différents professionnels de santé.
De nouvelles missions
Le texte entérine tout d’abord une évolution des missions des infirmiers, jusqu’alors encadrées par un décret de 2004 qui, d’après la profession, n’est plus vraiment en phase avec les pratiques de terrain et la réalité du métier. Ce dernier est donc redéfini autour de cinq missions socles : la réalisation de soins infirmiers curatifs, palliatifs, relationnels et destinés à la surveillance clinique ; le suivi du parcours de santé des patients et leur orientation ; la prévention incluant le dépistage et l’éducation thérapeutique ; la participation à la formation des pairs ; et la recherche.
Le texte acte également la création de la consultation infirmière et introduit la notion de diagnostic infirmier. Jusqu’alors réservés aux professions médicales, ils font désormais partie du rôle propre infirmier. Il donne aussi à la profession l’autorisation de prescrire certains produits dont la liste sera définie par arrêté.
Le texte contient en outre une disposition visant à l’expérimentation de l’accès direct aux soins infirmiers dans cinq départements pour une durée de trois ans. « Concernant l’accès direct, la mise en œuvre va devoir être précisée car en parallèle, la loi Rist, dont les décrets d’application devraient être publiés avant l’été, prévoit également l’accès direct aux infirmiers pour la prise en charge des plaies et cicatrisation », rappelle John Pinte, président du Syndicat national des infirmières et infirmiers libéraux. Les décrets et les arrêtés devraient expliciter ces différents points, en fonction du contenu du texte qui sera adopté par les sénateurs.
Concernant la pratique avancée, de nouvelles mentions pourront voir le jour notamment au sein des services de protection maternelle et infantile (PMI), de santé scolaire et de l’aide sociale à l’enfance.
Réactions de la profession
L’Ordre national des infirmiers (Oni) s’est félicité de l’adoption du texte de loi qui permet de « valoriser la profession, lui reconnaître de nouvelles compétences dans un exercice sécurisé pour une meilleure prise en charge des patients ». La Fédération nationale des étudiants en sciences infirmiers (FNESI) a également salué « l’avancée majeure pour le système de santé », que représente l’adoption de cette loi, qui doit « permettre d’accroître la reconnaissance de la profession et d’élargir son exercice ».
« Le texte tel qu’il a été adopté nous convient, mais nous regrettons toutefois que la quatrième année pour la formation des étudiants en soins infirmiers n’ait pas été actée », regrette Thierry Amouroux, porte-parole du Syndicat national des professionnels infirmiers (SNPI) et vice-président du Conseil national professionnel infirmier (CNPI). Selon lui, le ministère reste « dans une position dogmatique sur les trois années d’études alors que nous leur avons adressés toutes les études internationales qui démontrent l’intérêt de passer à quatre années notamment pour la hausse de l’espérance de vie en bonne santé des patients ».
Un vote attendu au Sénat
L’ONI appelle désormais les sénateurs à se saisir « sans plus attendre » du texte adopté pour l’examiner et l’adopter à son tour. La Fédération nationale des infirmiers (FNI) se félicite d’ailleurs de la décision du gouvernement de faire passer ce texte en procédure d’urgence, « ce qui va permettre d’accélérer le dispositif de navettes parlementaires, mettant fin aux incertitudes de calendrier ».
Les députés ont également approuvé, à une très large majorité, des amendements demandant l’ouverture de négociations conventionnelles entre les syndicats représentatifs des infirmiers libéraux et l’Assurance maladie, sur la rémunération des infirmiers lors de la publication et de l’actualisation de l’arrêté fixant la liste des actes et soins qu’elles réalisent.
« Le texte de loi devrait être adopté avant l’été, espère John Pinte, ce qui donne la possibilité au ministère d’ouvrir des négociations conventionnelles à l’automne. Il s’agit d’une bonne échéance, mais un peu trop lointaine pour nous. Nous allons demander à ce qu’elles soient ouvertes plus tôt. »
Laure Martin