Que ce soit en libéral ou dans le secteur hospitalier, dans les centres de santé ou dans la fonction publique, depuis leur « création », les Infirmiers en pratique avancée (IPA) ont toujours dénoncé leur rémunération. L’Union nationale des infirmiers en pratique avancée (IPA) a d’ailleurs rendu public le 4 mars les résultats d’une consultation nationale qui a mobilisé plus de mille répondants sur cette question.

Cette enquête* de l’Unipa vise à dresser un état des lieux précis des conditions salariales des IPA en France, à identifier les principales difficultés rencontrées et à proposer des pistes d’amélioration face à ce qui représente l’une des préoccupations majeures des IPA, quel que soit leur mode d’exercice.
Dans la fonction publique
51 % des répondants à cette consultation exercent au sein de la Fonction publique hospitalière (FPH) et parmi eux, seuls 5.5 % sont satisfaits de leur rémunération. Ils annoncent une augmentation moyenne de 94 euros par rapport à leur ancien salaire d’infirmier, alors que l’écart salarial entre infirmier et IPA devrait, selon eux, d’être de 530 euros. 65 % estiment cependant que, hors considération financière, leurs compétences sont reconnues.
Par ailleurs, 13 % des répondants ne sont pas encore intégrés au sein de la FPH en tant qu’IPA, avec une attente moyenne de 8,3 mois. Ceux qui le sont, l’ont été par concours (45 %) et par intégration directe (55 %). Cependant, pour ces derniers, 55% n’ont pas bénéficié d’une reprise des services publics effectifs, contrairement à ce que prévoit le cadre réglementaire.
Parmi leurs attentes : la refonte des grilles indiciaires pour une reconnaissance réelle de leurs compétences et responsabilités, un salaire à 3 000 euros net en début de carrière, et l’attribution d’une nouvelle bonification indiciaire (NBI), ainsi que le recours à des primes comme celle d’exercice multisite.
Les IPA exerçant au sein de la Fonction publique territoriale (FPT) ne détiennent pas de grille salariale propre. Leur rémunération est souvent basée sur la grille des infirmiers et implique des négociations. Leur augmentation salariale moyenne est de 134 euros. Ils sont d’ailleurs 70 % à se dire insatisfaits de leur rémunération et plaident pour la création d’une grille salariale et une reconnaissance du statut, des compétences et des responsabilités, à travers une revalorisation significative
Dans le secteur privé
142 répondants à l’enquête exercent dans le privé, secteur où il n’y a pas de grille IPA, ce qui implique, là aussi, des négociations de salaire, donc une variabilité importante.
L’augmentation salariale moyenne est de 290 euros. 60 % des répondants ne sont pas satisfaits de leur rémunération et estiment que l’écart de salaire entre IDE et IPA devrait être de 671 euros. Eux aussi attendent une rémunération à la hauteur des responsabilités et du niveau d’études (3 000 euros mensuels en début de carrière), la prise en compte de l’ancienneté et de l’expérience.
Ils souhaitent également la création d’une grille salariale unifiée sur le territoire et l’inclusion des IPA dans les conventions collectives spécifiques.
Dans le secteur libéral
Parmi les IPA libéraux (IPAL), 65 % sont en exercice exclusif et 35 % en mixte. 70 % étaient libéraux avant de devenir IPA. Leur perte de chiffre d’affaires est en moyenne de 29 926 euros, par rapport à leur exercice libéral précédent.
Ils ont un chiffre d’affaires annuel moyen de 47 460 euros et un Bénéfice non commercial (BNC) de 25 536 euros. Seuls 5 IPAL ont connu une augmentation de leur chiffre d’affaires par rapport à leur ancienne rémunération infirmier libéral.
60.3 % jugent le modèle de rémunération actuel inadapté et plaident pour une révision des forfaits en lien avec la réalité de certaines pratiques (psychiatrie, parcours complexes), une augmentation du nombre de forfaits cotables ou encore une révision des facturations des parcours ponctuels. Enfin, ils demandent la systématisation de l’aide à installation via les Agences régionales de santé (ARS), de manière équivalente aux médecins généralistes.
De leur côté, les IPA Asalée affichent une augmentation de leur salaire de 372 euros, mais 42 % ne sont pas satisfaits de leur rémunération.
Les étudiants
Du côté des étudiants, 62 % bénéficient d’un financement employeur, 20 % financent personnellement leurs études, 18 % disposent d’un financement mixte.
Pour ceux qui perçoivent un financement de l’ARS, l’aide est en moyenne d’un montant de 45 465 euros pour l’ensemble des deux années. Mais 50 % des étudiants connaissent une perte financière durant leurs études. 60 % d’entre eux se destinent à un exercice dans la fonction publique hospitalière, 16 % en libéral, 15 % dans le privé et 7 % dans le milieu associatif. 25 % n’ont pas pris connaissance des rémunérations avant de s’engager dans les études. Ils sont 67 % à affirmer que la rémunération pourrait leur faire changer leur projet professionnel. À leur retour d’étude, ils s’attendent à une augmentation salariale moyenne de 137 euros mais estiment qu’une augmentation juste serait de 593 euros en moyenne.
Des attentes pour demain
Pour l’Unipa, les résultats de cette étude montrent une insatisfaction générale des IPA concernant leur rémunération et leur reconnaissance.
Le syndicat plaide pour une refonte des modèles de rémunération et une meilleure reconnaissance des compétences des IPA, essentielles pour l’avenir de la profession dont « l’attractivité est en berne ». Il revendique également une clarification du statut de la profession, afin de la positionner en tant que profession médicale intermédiaire, « ce qui pourra permettre de résoudre à la fois des problèmes organisationnels, mais aussi de retravailler la reconnaissance salariale ».
La proposition de loi infirmière, actuellement en discussion au Parlement, devrait intégrer de nouvelles avancées pour les IPA, afin d’assurer la pérennité de la profession.
Laure Martin
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*Profil des Répondants : 77 % de femmes et 23 % d’hommes. Prédominance des 31-50 ans (80 % des répondants) Expérience moyenne de 10 à 15 ans comme IDE avant d’être IPA.
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