Covid long : le parcours sinueux et douloureux d’un infirmier

Covid long : le parcours sinueux et douloureux d’un infirmier

Dominique L, 57 ans, infirmier cadre de santé hygiéniste dans un établissement privé a but non lucratif de l’est de la France, souffre d’un Covid long depuis quatre ans. Comme pour les non-soignants, cette maladie a profondément bouleversé  et affecté sa vie. Mais sa profession constitue, selon lui, un atout.

© Horth Rasur / ShutterStock

Qu’on soit soignant ou pas, le Covid impacte cruellement la vie des personnes qui l’ont contracté, surtout dans sa forme longue, qui dure, dure, dure…

Dominique L a été contaminé le 17 mars 2020, lors de la réunion de formation qu’il a animée, dans une petite salle, auprès d’infirmiers et de médecins du service de réanimation sur la prévention et les moyens de protection contre la Covid.

« Aucun patient infecté n’avait encore été admis à l’hôpital, raconte l’infirmier, donc il n’était pas nécessaire de prendre de précautions particulières. Mais le lendemain, un médecin réanimateur qui était présent à cette réunion était intubé et ventilé dans le service pour un Covid ».

Et cinq jours plus tard, lui-même présente des signes d’infection. Les urgences sont saturées de patients Covid dont l’état est plus grave que le sien : il n’est pas hospitalisé. Le diagnostic est clair cependant et il est arrêté pendant plus d’un mois. « Avec le traitement symptomatique, poursuit-il, il y a eu une amélioration mais une asthénie importante persistait ».

Fin avril, il reprend le travail mais un mois plus tard les symptômes réapparaissent, plus nombreux. Dominique L en dresse la longue liste : problématiques de concentration et de mémoire, céphalées intenses toute la journée et résistantes à tous les traitements, fièvre sans aucun signe inflammatoire, tachycardie, diminution de l’acuité visuelle, myalgie, arthralgie, perte d’équilibre et un essoufflement au moindre effort…

Tâtonnements

À cette époque, le Covid long n’est pas encore documenté. Le médecin traitant de Dominique L tâtonne. Il consulte un autre généraliste et sa « prise en charge a complètement changé, se souvient l’infirmier. Il a mis en place pour moi un parcours de soins coordonné. »

Entre temps, des études britanniques commencent à évoquer une forme longue du Covid. Un pet-scan et des tests neuropsychologiques plus tard le confirment : il s’agit bien d’un Covid long.

La prise en charge se met en place à l’été 2020, à raison de deux séances par semaine d’orthophonie et aussi, après des échecs thérapeutiques douloureux, faute de prise en charge adaptée, de kinésithérapie. « J’ai de la chance, je suis un professionnel de santé et je suis acteur de ma santé, remarque l’infirmier. J’essaie de m’adapter et quand c’est compliqué, je cherche ou mon médecin traitant cherche un spécialiste qui peut m’aider. »

Il suit aussi un traitement contre des problèmes de somnolence diurne et est appareillé contre les apnées du sommeil. Il est aussi suivi par un infectiologue du CHU. « Mon médecin traitant fait le lien pour avoir une vision globale de la pathologie », commente Dominique L. Il a cependant un regret : ne pas pouvoir participer à un essai thérapeutique puisqu’aucun n’est mené en France sur le Covid long. « J’ai 57 ans, deux enfants adolescents et j’ai envie de vivre plein de choses à leur côté, lance-t-il. S’il y a des solutions, je veux les essayer ! » Grâce à leur soutien et à celui de son épouse, en tout cas, il reste optimiste.

Rester optimiste

Aujourd’hui pourtant, le tableau de ses symptômes a peu évolué : peu ont diminué et certains se sont même aggravés. À l’issue de trois ans et demi d’arrêt maladie, il a repris le travail en février, à temps partiel (30%) thérapeutique.

Bien qu’il n’ait pas été hospitalisé et placé sous oxygène lors de la première manifestation de la maladie, ce qui aurait permis une validation automatique de ce Covid long en maladie professionnelle, il a obtenu cette reconnaissance en 2021. Il a donc pu percevoir des indemnités journalières du montant de son salaire pendant son arrêt et ses frais de santé liés au Covid, certains très coûteux, sont pris en charge à 100%. « Je n’ai pas les soucis qu’ont de nombreux infirmiers ou de patients dont le Covid long n’est pas reconnu, souligne-t-il. Beaucoup ont des problèmes financiers. »

Des malades ont perdu leur emploi. S’il a repris le travail, ce dont il avait très envie, Dominique Lang a désormais un nouveau poste… qui l’oblige à conduire 30km, ce qui le fatigue énormément. « Certains jours, ça va, d’autres jours c’est plus compliqué », résume-t-il.

Il n’a plus non plus de relations avec ses anciens collègues. Globalement, sa vie sociale s’est beaucoup restreinte : il a abandonné son mandat de conseiller municipal et réduit ses activités d’élu au conseil département de l’Ordre des infirmiers. En revanche, il se démène sur Twitter pour soutenir tous les patients concernés.

Géraldine Langlois

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