La nuit, en ce moment, il fait -9°C à Bordeaux. Cela n’a pas empêché Hélène, une infirmière libérale de 62 ans de s’installer devant les locaux de la CPAM. Et pour cause : Hélène est désespérée. Sa caisse lui réclame de rembourser 54 000 euros d’indus. Après deux combats et deux jugements auprès de la section des affaires sociales de l’Ordre des médecins (pour les dossiers antérieurs à 2015 en procédure ordinale, c’est l’Ordre des médecins qui s’occupe de ce genre de litige), et un passage au Conseil d’Etat pour annuler cette dette, Hélène s’est résignée à payer, même, si elle n’est pas d’accord avec la décision rendue. Mais elle demande un échelonnement de 4 ans pour rembourser. Ce que la CPAM ne semble pas lui accorder.
Du coup, toutes les facturations de soins auprès de ses patients sont prélevées à la source et Hélène n’a plus rien pour vivre. Elle qui ne veut pas revendre sa maison, est en colère. D’autant qu’elle n’a jamais vraiment compris pourquoi elle était redevable de cette somme.
L’histoire d’Hélène
Nous avions déjà suivi Hélène entre 2015 et 2016, pour notre dossier sur les litiges et les indus auxquels sont confrontés régulièrement les infirmiers libéraux. Elle nous expliquait alors son histoire. “Il y a six ans, des médecins experts mandatés par la CPAM sont allés chez mes patients. Ils les ont examinés, déshabillés. Ils ont tiré sur les sondes et les pansements. Puis plus rien…aucune nouvelle. Ce n’est que deux ans plus tard que dans ma boite aux lettres, je recevais une notification d’indus de 20 000 euros. Non seulement on me reprochait d’avoir mal côté mes actes, mais on m’accusait de fraude, en me collant un autre contrôle contentieux sur le dos. Ça a été un vrai choc pour moi, je ne comprenais pas” nous expliquait Hélène.
De 20 000 euros, son indu est passé à 50 000 en quelques mois, à cause d’AIS 3 dont la durée était inférieure à 30 minutes selon la Caisse, mais pas selon Hélène qui explique que la Caisse a interrogé, dans le cadre du contrôle, des patients atteints de troubles mnésiques, longtemps après les soins.
Puis de 50 000 à 54 000 euros pour des soucis de patients hospitalisés en journée – mais qui rentraient le soir – auprès desquels elle avait assuré des soins. “J’ai pourtant tous les justificatifs de soins, il n’y a aucun acte fictif” assurait Hélène, qui a dépensé 36 000 euros en frais de justice pour se défendre car elle ne voulait pas, après 30 années d’exercice et de bienveillance, être accusée de “fraude“. Elle n’a plus les moyens d’entamer d’autres procédures.
Des cas comme celui d’Hélène, il y en a des centaines en France en ce moment. Le problème soulevé par les infirmiers libéraux n’est pas tant celui de l’erreur dont ils sont accusés -même si elle est souvent remise en question par les professionnels -, mais bien celui de la retro-activité. Celui de la façon de procéder des Caisses aussi.
Car les sommes sont demandées de façon rétroactive sur une période de trois ans, la plupart du temps sans avertissement, et atteignent donc des sommets. « Avant, les infirmiers avaient la possibilité de rectifier le tir. Les Caisses les convoquaient dès qu’elles constataient une erreur. Il y avait une discussion et si l’infirmier était réellement en tort, on lui demandait de changer sa cotation. Mais si il y avait des actes à rembourser, cela concernait des périodes beaucoup moins longues et donc des sommes beaucoup moins importantes », nous expliquait l’an dernier André Dahan, de l’Association Infirmiers Solidaires.
Grand mouvement de soutien sur les réseaux sociaux
Alors que la presse généraliste commence à s’emparer du sujet – reportage sur France Bleu et dans Ouest France hier – , les réseaux sociaux professionnels eux aussi s’emballent. Sur la page facebook de l’association Unidel, Hélène a reçu de nombreux messages de soutien. Plusieurs infirmiers se sont également déplacés la nuit pour être auprès de l’infirmière sur les marches de l’entrée de la CPAM de Gironde.
Les Hashtags #JesuisHélèneDuflos et #Jesuisinfirmierlibéral ainsi qu’une vidéo de soutien créée par l’Association Unidel, circulent sur la toile, notamment sur Twitter.
Une pétition contre “les harcèlements des CPAMS” a également été créée. Quelques heures après sa mise en ligne, elle a déjà recueilli 539 signatures.
“La CPAM nous considère comme des statistiques, ne nous considère pas comme des êtres humains. Pourquoi une telle intransigeance? Pourquoi ne pas accepter d’entretien avec moi ou avec mon avocat? ” regrette Hélène.
Hélène dormira sûrement encore dehors ce soir…sauf si elle reçue par la CPAM et qu’elle peut s’expliquer. A suivre…
Malika Surbled
Vidéo de soutien de l’Association Unidel
[youtube https://www.youtube.com/watch?v=S1dMUs1MI6E&w=560&h=315]
Procédures : quelques notions de droit.
Extrait de notre dossier paru dans le numéro 20 d’ActuSoins (Mars / Avril / Mai 2016). Pour s’abonner au magazine ActuSoins, c’est ICI.
La Caisse peut déclencher cinq sortes de procédures, cumulables entre elles.
– La procédure conventionnelle : elle avertit l’infirmier d’une erreur potentielle et lui demande de corriger ses pratiques. « C’est une procédure prévue par la convention infirmière mais qui n’est plus jamais utilisée par les Caisses », explique Maître Klingler, avocat. Car les directeurs des CPAM ont le pouvoir de réclamer des indus aux professionnels libéraux, sans explications préalables, ni avertissements.
– La procédure dite « de notification d’indu » :l’infirmier reçoit un courrier notifiant un indu. Il a deux mois pour contester auprès d’une commission de recours amiable de la Caisse. Au-delà, la contestation n’est plus possible. Si ses arguments convainquent, la procédure s’arrête. Mais cela serait rarement le cas, selon André Dahan, président de l’Association Infirmière Solidaire : « La commission n’est pas paritaire. Seuls des représentants de la CPAM y siègent ». Quand l’indu est maintenu ou si la commission ne donne pas de réponse dans le mois qui suit la contestation, l’infirmier peut saisir le tribunal des affaires de la sécurité sociale (TAAS). Puis, faire appel auprès de la Cour D’appel et, si nécessaire, se pourvoir en Cassation. La Caisse peut elle aussi faire appel des décisions rendues.
– La procédure ordinale : déclenchée par les Caisses d’assurance maladie, de façon isolée ou en complément d’une procédure de notification d’indu et/ou d’une procédure pénale. Si l’affaire est antérieure à 2015, l’infirmier sera jugé devant la Section des assurances sociales du Conseil régional de l’Ordre des médecins. Si l’affaire est plus récente et si l’infirmier est bien inscrit à l’ONI, c’est l’Ordre Régional des Infirmiers qui devrait s’en charger. En plus de sanctions disciplinaires (avertissement, blâme ou interdiction d’exercer), les instances ordinales ont le pouvoir de réclamer le reversement aux organismes d’assurance maladie du trop-perçu. Les professionnels peuvent faire appel de la décision auprès du Conseil national de l’Ordre des médecins, ou des Infirmiers (selon jugement en première instance). Puis se pourvoir auprès du Conseil d’Etat puis devant la Cour européenne.
– La procédure pénale : déclenchée elle aussi par les Caisses, de façon isolée ou en complément d’une procédure de notification et/ou ordinale. Quand la Caisse estime qu’ils ont délibérément fraudé, les infirmiers passent devant le tribunal correctionnel. C’est dans ce cas que les infirmiers sont placés en garde à vue. « Les officiers de police répètent les dires de la CPAM, ils brandissent la nomenclature. On n’est pas aux Etats-Unis ! En garde à vue, l’avocat ne peut pas s’interposer. Il ne peut que faire des observations a posteriori. C’est extrêmement éprouvant pour les infirmiers. Ils doivent absolument se préparer soigneusement en amont avec leur avocat », explique Maître Klingler.
– La Commission des pénalités : paritaire, elle est composée de membres de la CPAM et de représentants de la profession. Elle peut demander une majoration (jusqu’à 200 %) de l’indu initial.
M.S
L’indépendance des tribunaux remise en question
Quelle que soit la juridiction, professionnels et avocats dénoncent un manque d’impartialité. « Le tribunal des affaires de la sécurité sociale dépend de la sécurité sociale !, s’exclame André Dahan.Comment voulez-vous qu’il soit impartial ? ». Plusieurs avocats, à ce sujet, n’ont pas hésité à plaider la QPC (Question prioritaire de constitutionnalité) dans de récentes affaires, plutôt que le fond.
Concernant l’Ordre des médecins, « ce n’est pas mieux », selon Maître Klingler. « Les médecins font partie de la CNAM, ils sont donc juges et parties. Leur objectif est d’obtenir un équilibre financier. Ils sont le plus souvent extrêmement accusateurs et s’acharnent sur les infirmiers, sans se soucier d’ailleurs des besoins réels de soins des patients ! L’infirmier unique qui siège au CNOM se retrouve seul contre tous », ajoute l’avocate.
Quant au pénal, la stratégie consiste toujours à présenter les situations de façon dramatique. « La Caisse qui connaît son sujet va faire en sorte de faire un rapport très détaillé, n’hésitant pas à dire que l’infirmier travaille 35 heures par jour plutôt que de présenter les choses autrement. Les policiers ne sont pas formés pour ce genre d’affaire. Ils ne feront finalement le plus souvent que répéter ce que la Caisse dit, sans faire de vraie enquête », note Maître Klinger.
M.S
Bonjour
Je vous invite à rejoindre notre groupe pour discuter entre professionnels sur le thème de la santé
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Bonjour Nathalie Tregaro, suite à quelques expériences de collaboration non concluantes avec le had , notre cabinet a effectivément décidé de cesser définitivement de travailler avec et ceci depuis 5 ans environ. Oui nous faisons du pallia, mais effectivement nous ne pouvons pas prendre plus d un patient en fin de vie sur notre tournée , oui nous assurons les nuits, c est un choix que nous avons fait tous les 3. Oui il y a des infirmières libérales (ou infirmiers) qui fraudent un max et discréditent l ensemble de la profession et ne pensent qu à leur porte monnaie. Mais oui certains had n hésitent pas à descriditer les compétences des idel auprès des patients ou expliquent qu ils seront présents H24…. Perso nos patients savent que ces arguments n en sont pas pou notre cabinet donc nous ne nous sentons pas spoliés.
En vous souhaitant longue route en had.
Tu es optimiste toi lol
Il faudrait que tu récupères un écrit de cette personne de la CPAM Frédérique Cuinier !!!!
Mais jamais ils n’ecriront cela noir sur blanc. ..
C’est à vomir …
Qu elle ne paye rien , Qu elle repasse devant les tribunaux !
Pour qu’il y ai eu contrôle des médecins conseils….l’infirmière concernée à du faire de sacrés boulettes en amont. .. il n’y a pas de fumée sans feu! En plus condamnée à 2 reprises appel par là justice….ca devrait vous interpeller. On appelle ça 1 fraudeuse! Et ça existe aussi chez les infirmières. ..ce qui decredibelise notre profession!
Cotations ou citations ???
Et pendant ce temps là, le radiologue facture à ma patiente une échographie non réalisée , car le psmt de sa hanche gênait… Euh… C’est quoi cette excuse??
Ils veulent nous détruire pour qu’on soit salariés dans les maisons de santé ou les had, il faut se battre contre ça!!!! Qu’elle ne lache pas!!!
Mendy Audile