La nuit, je l’ai choisie. Lorsque j’ai fini mes études d’infirmière en 2013, j’ai postulé avec enthousiasme pour un job qui m’a obligée à arriver au boulot à 21 heures et à en repartir à 7 heures du matin. Mon rythme était particulier : j’alternais entre une semaine de cinq jours et une de deux jours.
C’est comme ça que, pendant deux ans, j’ai pris mon petit-déjeuner à l’heure du goûter, j’ai sauté dans le bus direction l’hôpital pendant que mes amis profitaient de l’happy hour et je suis rentrée me coucher devant une série juste à temps pour voir le soleil se lever et les fêtards se traîner jusqu’à chez eux.
Infirmière de nuit : J’ai atteint ma limite
Plus de vie sociale, un organisme déréglé, des poches sous les yeux, une lutte permanente pour ne pas s’endormir au travail, un sentiment d’ennui et de régression à force d’être peu sollicitée intellectuellement, une angoisse latente de se faire agresser en pleine nuit… Les concessions étaient nombreuses.
En 2015, j’ai atteint ma limite.
Éreintée, j’ai décidé de sacrifier 200 euros de salaire et mes 15 semaines de « vacances » par an – obtenues en posant deux jours de RTT sur une semaine de deux nuits – et je suis passée de jour.
Cependant, si c’était à refaire, je foncerais les yeux baissés. Je ne regrette rien. Mon choix était le bon. Travailler de nuit a ses avantages. Surtout à l’hôpital.
Infirmière de nuit : La nuit, c’est bien pour les débutants
J’ai choisi la nuit pour une raison en particulier : un rythme moins intense qu’en journée, ce qui est favorable à l’apprentissage lorsque l’on est jeune diplômée. Et c’est pour cette même raison que j’ai décidé de changer pour le jour deux ans plus tard, j’avais acquis l’expérience nécessaire pour assumer cette tâche plus lourde et plus stimulante.
En sortant d’école, je ne me sentais pas l’assurance d’une infirmière expérimentée. J’ai donc préféré travailler de nuit où les sollicitations des patients et les soins à prodiguer se font plus rares. Entre 21 heures et minuit, lors de mon premier tour, l’activité est à son maximum.
Lorsque j’y étais, je passais voir chaque patient dans sa chambre, je changeais les perfusions si besoin et donnais les médicaments. A 5 heures du matin, je recommençais mon tour de surveillance et prodiguais les soins nécessaires. Entre temps, pendant 6 heures donc, il ne se passait pas grand-chose. Entre temps, c’est surtout de la surveillance et la gestion de situations d’urgence.
Bien sûr, il y a des exceptions, mais le plus dur la nuit, c’est de ne pas céder à l’appel de Morphée. Ne pas dormir de la nuit, ce n’est pas naturel. On s’y fait, mais on ne s’habitue jamais vraiment. C’est donc une lutte permanente qui puise chaque nuit un peu plus dans nos réserves.
Infirmière de nuit : Une vraie entraide au boulot
L’avantage d’avoir du temps devant soi, c’est que l’on peut bien faire son travail.Penser que la flemme pousse à choisir ce style de vie est une erreur.
Lorsque j’étais de nuit, je pouvais accorder des dizaines de minutes au même patient. J’étais là pour calmer les angoisses des malades insomniaques, pour prendre des décisions posément et pour aider les nouveaux infirmiers de nuit à s’acclimater.
Si la nuit vous empêche d’avoir une vie sociale en dehors du boulot, elle vous offre en revanche la possibilité d’en avoir une plutôt riche sur votre lieu de travail. Parce que je commençais à l’heure où tous mes amis finissaient, j’en profitais souvent pour prendre mon café “matinal” avec mes collègues. Un genre d’apéro à l’envers où l’on apprend à se connaître.
Une fois en service, nous sommes sollicités mais pas submergés, nous avons donc le temps de nous entre-aider et de discuter. Les conseils de mes collègues m’ont énormément aidés et m’ont permis de prendre confiance en moi et en mes choix.
Infirmière de nuit : J’ai pris confiance en moi
La nuit m’a également permis d’acquérir plus d’indépendance.
De nuit, il faut réfléchir à deux fois avant de déranger un médecin de garde à 4 heures du matin. J’ai donc appris à demander à mes collègues et à prendre des initiatives. Finalement, être de nuit m’aura rendu débrouillarde. Ce qui n’est pas plus mal vu la réaction de certains médecins lorsque vous osez les réveiller en pleine nuit !
Je me souviens encore de cette nuit où il m’a fallu convaincre un médecin de garde pendant des dizaines de minutes de bien vouloir se rendre dans le service à 2 heures du matin pour ausculter une patiente qui saignait du nez plus qu’abondamment. J’avais beau lui décrire l’épistaxis importante et la présence de gros caillots de sang, son sommeil restait prioritaire. Ennuyé de devoir se déplacer, il avait même levé la voix sur moi au téléphone : “Vous me réveillez pour ça ??”.
J’ai tellement insisté qu’il a fini par venir. Heureusement, sur place, il a constaté l’urgence. J’ai eu la preuve que j’avais bien fait de suivre mon instinct lorsqu’il a été question de transférer la patiente dans le service ORL de l’hôpital. Tenir tête à un médecin lorsque l’on est infirmière, ce n’est pas toujours évident mais c’est parfois vital.
Infirmière de nuit : C’était comme vivre dans un tunnel
La nuit, c’est donc l’école de la vie dans un hôpital. Ca l’a du moins été pour moi.
Cependant, je ne pourrais pas revivre les week-ends sacrifiés, le petit déjeuner à 16 heures et le manque de lumière en hiver. Etre de nuit m’a donné le sentiment de traverser un tunnel pendant toute la durée de ma semaine de travail. Rien d’autre n’a le temps d’exister. Dormir était la seule activité que je m’accordais en dehors de mes heures.
Heureusement, cette situation était éphémère. Après deux ans d’expérience de nuit, j’ai eu suffisamment confiance en moi pour commencer à travailler de jour. Aujourd’hui, je suis davantage au cœur de l’action et dans la pratique. Je me sens encore plus utile en tant qu’infirmière et à ma place dans cet hôpital.
Propos recueillis par Barbara Krief dans Obs Plus que nous remercions pour ce partage
que ce soit infirmière,aide soignant ou simple agent.de nuit ya toujours du boulot.je suis de jour et aimerais passé nuit justement.
17 ans que je bosse de nuit et j’aimerai bien ne rien avoir à faire de minuit à 5h.. Hélas je cours beaucoup…
Notre façon d appréhender le travail de nuit varie en fonction des individus si vs êtes petit ou grand dormeur, les raisons pour lesquelles vous avez choisi le travail de nuit ou s il est imposé
Selon le service aussi
Moi j ai plutôt apprécié le travail de nuit plus de contact avec les patients moins de déplacement d air pour rien, moins de hiérarchie plus d autonomie mais avec un peu d expérience c est mieux cela évite les montées d adrénaline inutiles et l appel au médecin pour pas grand chose parfois et les engueulades qui suivent
Chacun son chemin……
Carmen Mathe
Voilà encore un cliché sur le travail de nuit! !!! Que cette jeune IDE viennent dans mon service et on verra si son témoignage est le même! !! Quand à la vie sociale, de jours tu sacrifies aussi des week end !!! Pour moi, bosser de nuits me permets de profiter plus de mon fils et de mon mari !!!!
9 ans de nuit et pour rien au monde je reviendrai de jour : on a notre autonomie ; par contre c’est sûr on se sent un peu seule devant les “ennuis” ……..mais il n’y a pas tt le brouhaha de la journée ; ses va-et-vient etc………….par contre il y a tjs qq chose à fre la nuit : les soins , les surveillances , l’accueil des urg ……………je ne sait pas où cette fille travaille mais ……il ne faut pas qu’elle change d’hôpital 😉 ….ou alors c’est autre chose ………………en plus jeune diplômée la nuit ………..ce n’est pas là que tu acquières le + d’expérience ………….et ses collègues ne devaient pas trop être rassurées o.O et elle non plus : tu es qd même seule devant l’urg avant que le méd veuille bien se déplacer…………………………………..
merci pour notre image de soignante, encore aujourd’hui certains nous appelle “les veilleuses” ca veut tout dire… mais notre travail de soignant la nuit n’a rien a voir a de simples veilleuses !
Valentine Vouland
Connaît pas nous hein ! ^^
C’est exactement ce que je me suis dit ,j’ai travaillé 22 ans de nuit dans un service de pneumo ;rares ont été les nuits où il ne se passait rien !!! Gérer les entrées sans interne de spécialité (ce n’était pas un CHU ) ,les soins ,pansements de drain inondés ,perfs, changes , les patients qui n’allaient pas bien ….(décompensations,malades en chimio ,fins de vie etc…)!!!! Sans compter, ces dernières années, les entrées de patients relevant d’autres spécialités qu’il fallait prendre en charge ,faute de place …. pas exactement de tout repos ,ni ennuyeux ,ni routinier ….