Un rôle complexe et multiple
Difficile d’obtenir une entrevue avec Monique Rothan-Tondeur. Non pas qu’elle mette de la mauvaise volonté à rencontrer une journaliste d’Actusoins. Bien au contraire. Seulement, son agenda est plein. Mais quand elle reçoit, elle le fait bien.
C’est autour d’une tasse de thé, dans son bureau, à l’hôpital Charles Foix (Ivry Sur Seine), que la rencontre a lieu. L’attente auprès de son assistante personnelle n’est pas longue. Un sourire, une brève présentation, et Monique Rothan-Tondeur s’emballe pendant une heure, à parler de sa profession. « Je suis infirmière » déclare-t-elle. Étrange pour un docteur HDR – habilité à diriger des recherches – en santé publique .
Si Monique Rothan-Tondeur se définit de la sorte, c’est qu’elle n’a jamais oublié son premier métier. « Tout ce que je fais, c’est pour le bien des patients et de la profession », explique-t-elle. Ses mots simples et justes attestent de sa pédagogie. A l’aide d’une feuille de papier et d’un stylo, « indispensables pour structurer les idées », elle n’hésite pas à évoquer son rôle au sein de la communauté infirmière.
Initiatrice de la recherche paramédicale
Tout d’abord, à l’EHESP, elle a inscrit la recherche infirmière et paramédicale au même titre que n’importe quelle autre recherche scientifique. S’évertuant à donner de la crédibilité aux travaux concernant la profession, elle est l’instigatrice de masters et de doctorats accessibles aux infirmières, mais aussi à tous ceux qui s’intéressent de près à l’évolution du métier.
« Nous avons par exemple une étudiante qui termine son master de géographie de la santé. Elle souhaite faire une recherche sur la territorialité des infirmières ayant des missions d’interim. C’est très intéressant. Cela pourrait nous permettre de comprendre les mouvements géographiques de la profession et de décrire des phénomènes sur les périmètres d’intervention », explique Monique Rothan-Tondeur, insistant sur le fait que la recherche paramédicale a tout intérêt à s’ouvrir à un maximum de compétences.
Pour elle, l’évolution vers des pratiques avancées, faisant progresser certaines infirmières vers le statut de praticienne est indispensable. Elle approuve le rapport Hénart relatif aux métiers de la santé de niveau intermédiaire soumis à Xavier Bertrand en janvier 2011. « Cela permettrait d’élargir le champ d’activités et de reconnaissance de certaines infirmières hyper-spécialisées dans un domaine, à travers un décret de compétence adéquat» .
Nommée à la présidence du comité de sélection du programme de recherche en soins infirmiers en 2009 par Roselyne Bachelot – à l’époque ministre de la santé -, Monique Rothan-Tondeur est satisfaite des résultats obtenus. « Nous avions très peur que peu d’infirmières soient intéressées par la recherche en montant ce projet qui ne leur étaient pas ouvert auparavant. Finalement, c’est un succès. La première année, 84 dossiers ont été déposés. À présent, nous avons 115 paramédicaux, dont 90 infirmières environ, qui s’investissent dans un réel travail de recherche. »
La connaissance comme devise
Lorsqu’elle travaillait au bloc de neurochirurgie de Lariboisière il y a plus de 30 ans, Monique Rothan-Tondeur était loin de s’imaginer qu’elle occuperait un jour un tel poste. Tout ce qu’elle savait, c’est qu’elle était animée par un désir d’apprendre qui ne cessait de croître. « J’allais en cachette et sur mon temps libre, suivre les cours que suivaient mon frère, alors étudiant en médecine », se souvient-elle.
Après quatre années à apprendre « sur le tas » la spécialisation de panseuse, elle décide de se consacrer à l’enseignement en attendant de pouvoir prétendre à un poste d’hygiéniste. « À l’époque, c’était tout nouveau, il me fallait d’abord faire mes preuves et être cadre ». Ce court laps de temps lui permet de construire sa vie personnelle en fondant une famille, tout en multipliant l’acquisition de diplômes universitaires qui lui permettront bien plus tard de reprendre un DEA puis un doctorat en santé publique. Hygiéniste pendant 15 ans, elle se voit confier des missions de plus en plus ambitieuses, notamment celle de monter l’observatoire du risque infectieux en gériatrie.
Lorsqu’elle évoque le temps où elle soignait, Monique Rothan-Tondeur est un brin nostalgique. Pourtant, le terrain ne lui manque pas. « Je me lassais vite finalement. Néanmoins, je suis marquée par ces années, à tel point que j’en rêve encore très régulièrement. Je me souviens de tous les patients décédés au bloc, cela ne me quittera jamais ». Monique Rothan-Tondeur exerce maintenant et depuis longtemps dans un bureau. Elle est infirmière, mais autrement.
Malika Surbled
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